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12.02.2021 / FINANCEMENT DE L’éCONOMIE ET DéVELOPPEMENT RAPPORT ANNUEL 32EME

Supervision de la Banque Centrale de Tunisie des banques et des établissements financiers

L'extrait de mission
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Supervision de la Banque Centrale de Tunisie des banques et des établissements financiers

Cadre juridique et réglementaire de la supervision bancaire 

La promulgation et la révision  des textes d’application règlementaires de la loi bancaire n’ont pas été achevée jusqu’ à la fin 2019, à l’instar de la fixation des conditions organisationnelles en matière de gouvernance et des normes spécifiques aux établissements financiers d’importance systémique ainsi que les conditions d’application d’une surveillance complémentaire des conglomérats financiers . De même, la note sur les termes de référence pour l'audit des comptes fixant les diligences nécessaires à effectuer par les commissaires aux comptes n’a pas été non plus révisée.

Par ailleurs, Il a été noté que le cadre réglementaire de la supervision bancaire n’était pas cohérent avec certaines exigences des normes prudentielles Bâle II et Bâle III, notamment en ce qui concerne la méthode de calcul du montant des risques de crédit dans la formule du ratio de solvabilité qui s’inspire toujours de l’approche Bâle I. De plus, le ratio de liquidité à long terme n’est pas toujours adopté par la banque centrale, surtout que certains bailleurs de fonds internationaux rattachent le volume et le coût de leurs aides financières au niveau du respect des pays concernés de ces normes .

En outre, la non clarté de certaines dispositions règlementaires liées aux calculs du taux d’intérêt effectif global et leur incompatibilité avec les exigences de la loi n° 64 de l’année 1999 ont conduit à des imprécisions dans le calcul de ce taux par les banques qui est déclaré à la banque centrale ce qui est de nature à  impacter le calcul de la moyenne de ces taux par la banque centrale et par conséquent les limites des seuils des taux d'intérêt excessifs correspondants.

La Banque centrale n’a pas non plus émis des circulaires spécifiques qui réglementent les sanctions en cas de non-respect de certaines normes prudentielles, telles que le taux maximum de rémunération des dépôts et des dépassements des plafonds des participations des banques et établissements financiers au capital des entreprises.

Bien que la banque centrale ait émis une note interne qui réglemente la méthode de calcul des sanctions en ce qui concerne les infractions liées aux non-respect des règles de gouvernance et du contrôle et de gestion des risques de blanchiment d’argent, la banque centrale n’a pas édité de circulaire en la matière.

La Cour de comptes recommande l’accélération de l’achèvement et la mise à jour  du cadre réglementaire conformément aux dispositions de la loi bancaire et des lois règlementant les conditions bancaires.

Les mécanismes et les domaines de la supervision bancaire 

La Banque centrale exerce un contrôle sur pièces fondé sur l'approche basée sur les risques en examinant et en exploitant une liste de documents que les banques et les établissements financiers communiquent périodiquement en plus des rapports de leurs commissaires aux comptes. La circulaire relative au reporting obligeait les banques et les établissements financiers à fournir tous les documents de reporting à partir de la fin du mois de juin 2018 en utilisant le Système d'Echange des Données(SED).Toutefois, certaines fonctions de ce système ne sont pas encore disponibles et  aucun contrôle automatique n'a été conçu pour surveiller la conformité ou et la cohérence entre les données mensuelles, trimestrielles, semestrielles et annuelles jusqu'à la fin de 2019.

En se référant aux données de la plateforme en ligne pour la période allant de juin 2018 à septembre 2019 , la Cour des Comptes a pu constaté que le taux de communication des documents de toute nature par 20 banques est faible. En effet, ces taux varient entre 70%, 32,5% et 45% respectivement pour  les données mensuels, trimestriels et annuels ,ce qui est de nature à limiter l'efficacité du processus d'évaluation des différents risques par la direction générale de la supervision bancaire de la banque centrale.

En outre, le taux de réalisation des missions d'inspection sur place n'a pas dépassé 75% par rapport aux missions programmées pendant la période 2015-2019.Ceci est due principalement à la réalisation de 40 missions d'inspection ponctuelle réclamées par le gouverneur de la banque centrale.

En plus, la faiblesse du nombre des superviseurs à la direction générale de la supervision bancaire a contribué au retard enregistré dans l’achèvement des composantes du plan d’action pour la période 2015-2020 d’une part, et à la non-couverture des missions d'inspection sur place de toutes les banques et tous les domaines de contrôle d’autre part. Il est à noter que dans son rapport en 2014, le Fonds Monétaire International (FMI) avait indiqué que cette direction devrait être renforcée par 40 superviseurs.

 Les rapports d'inspection sur place relatifs aux risques de crédit et au taux d'intérêt effectif ont relevé des infractions liées à la non constitution des provisions suffisantes concernant les risques de crédit estimés par les superviseurs de la banque centrale à un montant de 146,6 MD, ainsi qu'au non-respect du taux d'intérêt effectif global. Ces rapports indiquent qu'aucune réserve n'a été formulée à cet égard par les commissaires aux comptes de ces banques dans leurs rapports.

Par ailleurs, les réponses des banques au questionnaire relatif à l’évaluation du dispositif de gestion des risques de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme ne reflètent pas la réalité des dispositifs pris à cet égard. En effet les rapports d’inspection réalisés ont soulevé des irrégularités qui n'ont pas été déclarées par les banques en question, telles que le non-respect des délais d’exécution des décisions de gel des fonds et des délais de déclarations des soupçons et l’absence de mesures supplémentaires en cas de détection existence de relations avec les personnes résidant dans des zones classées à risque par le GAFI.

Les rapports d'inspection sur place relatifs aux taux de rémunération de dépôts effectués au cours du premier trimestre 2019 concernant 15 banques, ont relevé également plusieurs irrégularités, en effet, 14 banques n'ont pas respecté le taux maximum fixé à 2% sur les dépôts à vue, de même 7 banques n'ont pas respecté les taux maximums autorisés par la banque centrale sur les dépôts à terme. Le montant total des intérêts dépassant le taux légalement fixé pour chacun de ces dépôts s'élevait respectivement à 29 MD et 13 MD.

Cette situation exige le renforcement des mécanismes de contrôle sur pièces et l’achèvement du programmes annuels d'inspection, afin de relever les insuffisances et les irrégularités et de prendre des mesures correctives pour y remédier dans les meilleurs délais.

Les sanctions 

La banque centrale n'a pas prononcé de sanctions au sujet de plusieurs infractions relevées dans le cadre de contrôle sur place ou à l'occasion de travaux de contrôle sur pièces. Ces infractions, concernent principalement les domaines de la gouvernance, du contrôle interne, de lutte contre le blanchiment d'argent, l'octroi des crédits à un taux d'intérêt excessif et la surenchère des taux de rémunération des dépôts. La Cour a estimé le montant des sanctions non infligées dans les domaines de la gouvernance et du contrôle interne et la lutte contre le blanchiment d'argent respectivement à environ 123,125 MD et 47,8 MD. De plus, la banque centrale n'a pas publié les décisions de sanctions prononcées par le gouverneur de la banque centrale à l’encontre des banques, contrairement aux exigences la loi bancaire.

De surcroît, il n’a pas été procédé à l’activation de la  commission indépendante des sanctions prévue par la loi bancaire chargée notamment d’infliger  des sanctions à l’encontre des banques qui communiquent des fausses déclarations à la banque centrale, et qui ne respectent pas les dispositions légales et réglementaires relatives aux transactions avec les personnes liées. Cette commission suggère aussi des sanctions vis-à-vis des commissaires aux comptes qui ne respectent pas les obligations qui leurs sont incombe en vertu de la loi bancaire.

La Cour recommande de veiller à activer le dispositif des sanctions afin de renforcer le pouvoir disciplinaire de la banque centrale de nature à garantir le respect des banques et des établissements financiers des dispositions réglementaires et légales régissant le secteur bancaire.

 

 
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